Il y a toujours une histoire de bateau quelque part…
Je suis née sur île située en plein milieu du golfe du Saint-Laurent. Mes limites géographiques se terminaient où le ciel fusionne avec la mer, mes limites imaginaires, bien au-delà.
Vivre insulaire est comparable à vivre dans un aéroport: les rapports avec l’extérieur sont inévitables et l’on oscille constamment entre des arrivées, des départs et des retours. On passe notre vie à attendre: des gens, des denrées, des idées qui émergent de l’autre bout de l’horizon, parfois notre propre périple. Lors des moments d’attentes, l’étendue de bleu qui nous encercle devient le théâtre de bien des scénarios…
J’ai commencé à créer pour oublier mon attente et transcender les moments interminables. Après avoir participé à une exposition collective sur ce thème, l’attente est devenu l’objet de ma recherche. Comme dans l’expression faire les cent pas, je vois dans la répétition une manière d’ancrer la conscience dans l’instant présent, tout en fuyant l’attente. Mes œuvres comprennent toujours des éléments issus de la répétition, que ce soit des gestes ou des icônes insérées de façon récurrente dans mes images.
Je produis des espaces narratifs dont l’inspiration
provient principalement du paysage et de la culture maritime: récits de naufrage, histoires de bateaux, outils de navigation. Or, les moyens que je déploie
pour y parvenir sont diversifiés. Mes installations et mes performances consistent à bâtir des fictions en combinant des images, des objets et des extraits de texte. Autrement, je peins des marines dans lesquelles j’inscris, je grave et je transfère des écrits originaux ou des extraits de documents. En peinture, comme dans le temps qui s’écoule entre un départ et un retour, je me plais à brouiller les limites entre les formes, les schématiser et les ramener à l’essentiel, c’est-à-dire leur stricte présence.